vendredi 22 novembre 2013

Haïti et ses Constitutions (12): Constitution de 1874 pour Michel Domingue.

Par Dr. Pierre Montès

Le Président Nissage Saget fait en sorte que Michel Domingue lui succède. En 1874, à la fin de son mandat, deux candidats seront en lice: Pierre Momplaisir Pierre (candidat du député Boyer Bazelais) et Michel Domingue (candidat du député Septimus Rameau). La Chambre vote en faveur de Pierre Momplaisir Pierre par 44 voix contre 21. Par la suite, la minorité se retire et, la Chambre, faute de quorum, ne pourra pas se réunir. Nissage Saget refuse de rester au pouvoir au-delà du 15 mai 1874, jusqu’à l’élection de son successeur, comme le lui proposent le Sénat et un certain nombre de députés. Il préfère démissionner après avoir nommé (inconstitutionnellement) le général Michel Domingue commandant de l’Armée. Le conseil des secrétaires d’État assure l’interim, convoque, le 20 mai 1874, les assemblées primaires qui éliront sous la pression du gouvernement une Assemblée constituante.
 
L'Assemblée constituante se réunira à Port-au-Prince pour d'abord nommer le 11 juin 1874 le nouveau chef d'État, Michel Domingue qui formera son cabinet quatre jours plus tard.   
 
L'Assemblée constituante écrira ensuite une nouvelle constitution qui confirmera Domingue dans ses fonctions (Article 190) de Président d’Haïti en précisant que son mandat a débuté dès le 11 juin 1874. 
 
La Constitution ne sera votée que le 6 août 1874.
 
Voici ce que stipulent quelques articles de la constitution de 1874 [*]:

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 Art. 190. — Le Président actuel de la République prêtera serment à la présente Constitution devant l'Assemblée nationale constituante.
 
Entré en charge le 11 juin 1874, il en sortira le 14 juin 1882.
 
***
 
Art. 59. — Les représentants sont élus pour trois ans. Leur renouvellement se fait intégralement.
Ils sont indéfiniment rééligibles.
Art. 61. — Le Sénat se compose de trente membres. Leurs fonctions durent six ans.
Art. 62. — Le Président de la République sortant soit par démission, soit à l'expiration de son mandat, est de droit membre du Sénat, pendant la durée fixée par l'article précédent.
Art. 63. - Les sénateurs sont élus par la Chambre des Représentants, sur la proposition du Président d'Haïti, ainsi qu'il suit:
A la session qui précède l'époque du renouvellement des sénateurs, le Président d'Haïti forme une liste générale de trois candidats pour chaque sénateur à élire, laquelle il adresse à la Chambre.
Art. 64. — La Chambre des Représentants élit, parmi les candidats proposés sur la liste générale, un nombre de sénateurs égal à celui des sénateurs à remplacer.
Cette élection se fait au scrutin secret et à la majorité absolue des suffrage.
Ces sénateurs seront pris dans chaque département comme suit :
7 sénateurs dans le département de l'Ouest ;
7 sénateurs dans le département du Sud ;
7 sénateurs dans le département du Nord ;
5 sénateurs dans le département de l'Artibonite ;
4 sénateurs dans le département du Nord-Ouest.
71. — Le Sénat est permanent; il peut cependant s'ajourner, excepté durant la session législative.
Lorsque le Sénat s'ajournera, il laissera un comité : ce comité ne pourra prendre aucune décision, si ce n'est pour la convocation du Sénat.
Art. 100. —Au Sénat seul il appartient de nommer le Président d'Haïti.
Cette nomination se fait à l'ouverture de la session de l'année qui complète les huit années de la Présidence, au scrutin secret et à la majorité des deux tiers des membres présents dans l'Assemblée.
Si, après un premier tour de scrutin, aucun candidat n'a obtenu le nombre de suffrages ci-dessus fixé, il est procédé à un autre tour de scrutin. Si, à ce second  tour, là majorité des deux tiers n'est pas obtenue, l'élection se concentre sur les trois candidats qui ont le plus de suffrages.
Si, après trois tours de scrutin, aucun, de ces trois candidats ne réunit la majorité des deux tiers, il y a ballottage entre les deux qui ont le plus de voix, et celui des deux qui obtient la majorité absolue est proclamé Président de la République.
En cas d'égalité de suffrages entre les deux candidats, le sort décide de l'élection.
Art. 101. — En cas de vacance de l'office de Président d'Haïti, pendant l'ajournement du Sénat, son comité permanent le convoquera sans délai.
Art. 112. — Le Président d'Haïti est nommé pour huit ans. Il entre en fonctions le jour de sa prestation de serment.
Art. 113. — Nul ne peut être réélu Président d'Haïti qu'après un intervalle de huit ans                                                                                      
Art. 115. - En cas de vacance définitive de l'office de Président d'Haïti, les secrétaires d'État, réunis en Conseil, exerceront sous leur responsabilité le Pouvoir exécutif.
Si lé Président d'Haïti se trouve dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, le Conseil des secrétaires d'État est chargé de l'autorité exécutive tant que dure l'empêchement.
Art. 136. —Un Conseil d'État composé de douze membres, à la nomination du Président d'Haïti, sera créé. Son organisation et ses attributions seront fixées par la loi.
Chaque conseiller d'État recevra de la caisse publique une indemnité de trois cents piastres par mois. — Leurs fonctions dureront trois ans.
Art. 190. — Le Président actuel de la République prêtera serment à la présente Constitution devant l'Assemblée nationale constituante.
Entré en charge le 11 juin 1874, il en sortira le 14 juin 1882.
Art. 191. — Il est laissé la faculté au Président d'Haïti, pendant un an, de révoquer, s'il y a lieu, les juges, afin d'élever la magistrature à la hauteur, de sa mission.
Art. 192. — Pour bien, concilier les intérêts du peuple avec ceux du culte catholique, apostolique et romain, qu'il professe, le Concordat laissant à désirer, le gouvernement est autorisé à en proposer la modification dans le but de créer le plus tôt possible un Clergé national.
Art. 193. — L'Assemblée nationale constituante exercera la puissance législative pendant le temps qui sera nécessaire jusqu'à la réunion de la Chambre des représentants des communes, à partir du vote définitif de la Constitution.

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[*] Louis-Joseph Janvier, Les constitutions d'Haïti/ Lois constitutionnelles de 1859 et de 1860 (pages 359-390) 

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